La Qualité de Vie au Travail (QVT) occupe une place importante dans les rapports publics et est omniprésente dans le domaine des ressources humaines. Avec l'émergence du travail hybride, elle est désormais au cœur des débats.

Mais qu'est-ce que la QVT exactement et comment l'appliquer dans vos entreprises ?

SOMMAIRE :

• La QVT, c’est quoi ?
• L’évolution de la notion
• À quoi sert la QVT ?
• Les liens entre QVT, engagement et performance
• Les 7 grands thèmes de la QVT
• Comment mettre en œuvre une démarche QVT ?
• Idées et exemples d’actions sur la QVT
• Les entreprises engagées sur la QVT
• Comment évaluer ce qui constitue une “bonne” action QVT?
• S’informer et se former sur la QVT

La QVT, c’est quoi ?

La QVT, c'est le sentiment collectif et individuel de bien-être au travail. Cela englobe divers aspects tels que l'ambiance, la culture de l'entreprise, l'intérêt du travail, les conditions de travail, le sentiment d'implication, le degré d'autonomie et de responsabilisation, l'égalité, le droit à l'erreur, la reconnaissance et la valorisation du travail accompli.

En prenant du recul, nous pouvons retenir quelques éléments clés : les conditions d'emploi et de travail, la possibilité de s'exprimer et d'agir, ainsi que l'importance du contenu du travail. La QVT englobe tout cela et invite également à aborder des sujets sociétaux tels que l'égalité professionnelle, la lutte contre les discriminations et la transformation digitale.

L’évolution de la notion

La notion de Qualité de Vie au Travail a évolué au fil du temps. Bien qu'elle trouve son origine dans la littérature anglo-saxonne à la fin des années 70 (sous le terme de "Quality of working life"), elle s'est popularisée en France à partir des années 2010, grâce aux négociations entre partenaires sociaux. L'Accord National Interprofessionnel (ANI) de 2013 et la loi Rebsamen sur le dialogue social en 2015 ont apporté un cadre légal à cette notion et ont progressivement remplacé le concept de risques psycho-sociaux (RPS) par celui de QVT.

Conditions de travail, RPS, QVT… Les termes utilisés pour décrire les conditions de travail ont évolué, reflétant ainsi le changement de perspective et d'attentes de notre société vis-à-vis du travail. La QVT met en avant une vision plus large des responsabilités de l'entreprise et propose une approche plus équilibrée et moins anxiogène du travail. Il est en effet souvent oublié que le travail contribue à la protection de la santé, tandis que les chômeurs ont un risque accru de problèmes de santé.

Plus récemment, on parle également de Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT) plutôt que de QVT. L'objectif est de mettre l'accent sur les conditions d'exercice du travail et sur les leviers organisationnels pour améliorer la situation des salariés. Ce terme rapproche également les aspects classiques de la QVT des enjeux de santé et de sécurité au travail, notamment depuis l'entrée en vigueur de la Loi Santé au Travail le 1er avril 2022, qui introduit d'importantes réformes en matière de prévention.

À quoi sert la QVT ?

En France, où le travail occupe une place prépondérante dans nos vies, le bien-être au travail revêt une importance significative. Bien que 90% des actifs se déclarent globalement satisfaits de leur travail, le mal-être au travail reste un véritable enjeu de santé publique. Il représente désormais 42% des arrêts de travail un coût colossale pour la Société en général...

Les liens entre QVT, engagement et performance

Est-ce que la mise en place de la QVT bénéficie à l’organisation au-delà de sa contribution au bien-être individuel et à la société ? En d’autres termes, est-ce que la QVT favorise la performance de l’entreprise ? En réalité, il est difficile d’isoler l’effet des politiques de QVT pour pouvoir l’affirmer de manière directe. Cependant, les études confirment que l’engagement et l’implication des employé·es favorisent la performance.

L’implication des employé·es est un facteur de performance reconnu. Les organisations qui adoptent des approches participatives et encouragent un dialogue social efficace obtiennent de meilleurs résultats. La création du Comité social et économique (CSE), conçu comme un espace de discussion privilégié sur la QVT, s’inscrit dans cette logique.

Les autres avantages reconnus d’une politique de QVT sont :

• un meilleur recrutement : les entreprises cherchent de plus en plus à se démarquer sur le terrain de la « marque employeur », face à des candidat.es plus exigeant.es, notamment en matière d’équilibre vie professionnelle-vie personnelle. Des classements d’entreprises et des portails comme Glassdoor mettent en concurrence les entreprises et publient leur performance en termes de bien-être au travail.
• la rétention des talents : sachant qu’environ un recrutement sur deux se solde par un échec au bout de 18 mois, et que le coût moyen d’un recrutement est évalué entre 15 000 et 45 000 €, les entreprises font tout leur possible pour fidéliser leurs équipes en offrant des parcours personnalisés, des outils modernes et un environnement de travail inspirant.
• la réduction de l’absentéisme et du turnover : les salarié·es français·es s’absentent en moyenne 18,6 jours par an, un chiffre en augmentation, ce qui a également un impact sur les coûts liés à la prévoyance des entreprises.

Les 7 grands thèmes de la QVT

Les 7 principaux thèmes de la Qualité de Vie au Travail (QVT) sont les suivants :

1. Le contenu du travail

Il s'agit de la priorité numéro un en matière de QVT. Cela concerne l’autonomie, l’adéquation objectifs/ressources, la variété des tâches et la charge de travail.

2. Les relations aux collègues Les relations de travail, souvent considérées comme superficielles, sont en réalité essentielles. Elles constituent un soutien important lorsque quelqu'un ne se sent pas bien.

3. Les relations à la hiérarchie Le rôle du management dans le mal-être au travail est souvent souligné et confirmé par de nombreuses études. Il est important de faire évoluer la culture et la fonction managériale afin de soutenir et de faciliter l'adaptation aux transformations de la société et du travail.

4. L’environnement de travail Les conditions de travail peuvent être stressantes, bruyantes, inadaptées, mais aussi stimulantes et conviviales. Cela devient particulièrement pertinent avec le développement du télétravail et les critiques concernant les espaces de travail ouverts. La réflexion se porte davantage sur la manière d'impliquer les employé·es dans les choix d'aménagement.

5. La relation à l’organisation Il s'agit de la façon dont on se positionne par rapport aux valeurs véhiculées par l'entreprise et à sa mission générale. La prise de conscience croissante des enjeux climatiques et sociétaux pousse les employé·es à vouloir agir également dans leur sphère professionnelle et à évaluer leur entreprise selon ces critères. La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) devient un facteur de différenciation sur le marché du travail.

6. L’articulation vie pro / vie perso Il joue un rôle majeur sur le bien-être au travail. Les plus concerné.es sont les 30-45 ans et les managers de proximité qui vivent souvent un conflit de loyauté, entre responsabilité familiales et obligations professionnelles. Les pistes relèvent à la fois des actions de l’entreprise (aménagement du temps de travail, ouverture du télétravail, droit à la déconnexion…) et de la responsabilité personnelle de chacun (identifier ses priorités, apprendre à déconnecter, refuser le présentéisme, etc.).

7. L’équilibre personnel Selon nous, une politique de QVT doit tenir compte de la situation personnelle de chaque individu tout en respectant l'intimité nécessaire. Des sujets tels que la santé physique (alimentation, sommeil, troubles musculo-squelettiques), les addictions, les stéréotypes liés au genre, au handicap, aux origines ou à l'orientation sexuelle ne s'arrêtent pas aux portes de l'entreprise. Engager le débat et proposer des solutions adaptées à chacun bénéficie à la fois aux personnes concernées et au fonctionnement global de l'organisation.

Comment mettre en œuvre une démarche QVT ?

1. Définir les objectifs et les priorités Pour mettre en place une démarche QVT efficace, il est essentiel de définir des objectifs qui sont alignés sur la mission de l'organisation. Lorsque ces objectifs sont en harmonie avec la stratégie de l'entreprise, il est plus probable d'obtenir le soutien de la direction et les ressources nécessaires.

Exemples d'objectifs possibles :

• améliorer la qualité du recrutement, diversifier le profil des salarié.es • réduire l’absentéisme / le turnover • favoriser la créativité, l’innovation, la prise de risque • faire évoluer la culture d’entreprise et le management • amener plus de cohésion, réduire les conflits dans les équipes • mieux répartir la charge de travail • améliorer la coopération entre différents services • protéger les personnes vulnérables dans une période difficile

2. Associer les personnes clé à chaque étape La QVT est une démarche collective, et il est important d'impliquer les parties prenantes à toutes les étapes du processus. La création d'un groupe de travail dédié à la QVT ou d'un comité de pilotage peut aider à élargir la vision et à susciter l'adhésion au projet.

Voici une liste (non exhaustive) des personnes que vous avez intérêt à associer :

• la Direction • les managers • les salarié.es • le CSE • les services de santé • les acteurs extérieurs : Selon les besoins, il peut être pertinent de faire appel à des partenaires externes tels que :

• les Associations Régionales pour l’Amélioration des Conditions (ARACT) soutiennent notamment les PME dans leur démarche avec des financements et des guides sectoriels
• les CARSAT peuvent vous aider notamment sur les accidents du travail
• les Intervenants en Prévention des Risques Professionnels (IPRP) assurent des missions de conseil et de prévention
• les mutuelles proposent ou peuvent financer des actions de prévention en entreprise. Renseignez-vous.

3. Expérimenter L'étape de l'expérimentation est essentielle dans la mise en œuvre d'une démarche de Qualité de Vie au Travail (QVT). Il est important d'intégrer les objectifs de la QVT dans le fonctionnement quotidien de l'entreprise et de mettre en place les actions, formations et outils appropriés pour atteindre ces objectifs.

Cela peut impliquer la création d'espaces de discussion, l'adoption de nouvelles méthodes de travail, l'organisation d'une semaine dédiée à la QVT comprenant des ateliers et des formations sur mesure, etc. Il est ensuite important d'évaluer les actions mises en place, d'identifier les réussites ainsi que les problèmes restants.

Un écueil courant est de se limiter à une QVT "institutionnalisée" qui se limite à l'envoi annuel de questionnaires aux employé·es, sans véritable changement concret. Il est essentiel de se lancer dans des actions concrètes, même si elles ne sont pas toujours parfaites. Cela permet d'ouvrir le dialogue et de provoquer un déclic pour la mise en place d'une véritable démarche de QVT.

4. Evaluer et pérenniser une démarche QVT Comme toute démarche qualité, on peut appliquer à la Qualité de Vie au Travail une approche cyclique et itérative d’amélioration continue. Il est important de disposer d’indicateurs QVT et de modalités de suivi des objectifs sur le moyen et long terme.

L'évaluation régulière et l'adaptation des actions permettent de pérenniser la démarche de QVT, en garantissant des améliorations continues pour le bien-être des employé·es et la performance globale de l'entreprise.

Idées et exemples d’actions sur la QVT

Il est important de rappeler que chaque démarche de Qualité de Vie au Travail (QVT) est unique. En fonction du secteur d'activité de votre entreprise, de sa taille, de la perception actuelle de vos employé·es et des personnes impliquées dans le processus, votre projet de QVT sera différent en termes de contenu et d'objectifs.

Les entreprises engagées sur la QVT

Ces dernières années, de nombreux classements ont été créés pour évaluer et distinguer les entreprises les plus avancées en matière de QVT. Les critères peuvent varier, certains de ces classements sont payants, et il peut parfois être difficile de distinguer une véritable démarche sur le terrain d'une simple opération de marketing axée sur la marque employeur. Cependant, ces classements restent utiles pour les initiatives inspirantes qu'ils mettent en avant. Voici quelques exemples :

• Great place to work publie chaque année son palmarès des "Entreprises où il fait bon travailler" en fonction de leur taille. En tant que créateur du label "Great Place to Work", ils fournissent sur leur site internet une description détaillée des entreprises labellisées, y compris leurs bonnes pratiques et leurs forces en matière de QVT.

• Top Employers propose également une certification "Meilleurs Employeurs" avec une liste des entreprises certifiées et une brève description de chacune d'entre elles.

• Glassdoor, le célèbre site d'offres d'emploi, permet aux employé·es de laisser des commentaires anonymes sur leur entreprise. Ces retours honnêtes sont utilisés par Glassdoor pour établir chaque année un classement des meilleurs employeurs.

• Lucca organise également les Awards du Bien-être au Travail depuis plusieurs années. Cette cérémonie récompense les meilleures initiatives en matière de RH axées sur le bien-être et la qualité de vie au travail. Avec des catégories telles que "l'idée à 0€", "le projet le plus innovant", "l'initiative Covid-19 la plus utile" et le "coup de cœur du public", cette cérémonie est une source d'idées et de motivation.

Comment évaluer ce qui constitue une “bonne” action QVT?

Il est facile de critiquer les baby-foots ou les cours de sport ou les ballons d’équilibre.... Une politique de QVT qui se réduit à l’installation de quelques nouveaux équipements et services manque sans doute le “centre de la cible” (à savoir le Contenu du Travail cf les 7 dimensions de la QVT). Pourtant, les salarié.es se montrent souvent ravis de ce type d’initiatives.

Comment prioriser entre différentes actions ? Comment satisfaire tout le monde ? Avant de lancer un projet, vérifiez qu’il répond globalement aux critères suivants. Il doit être :

• participatif : en associant les occupant.es d’un bureau au réaménagement de leur poste de travail, ils et elles se sentiront par la suite mieux armé.es et plus satisfait.es de leurs conditions de travail.

• équitable : le projet est inclusif, respectueux des différences, il ne favorise pas un groupe de personnes plutôt qu’un autre (les hommes ? les salarié.es de tel service ? etc. ), ou alors des compensations ont été imaginées.

• générateur de rencontre : Imaginez comment votre action peut être source d’ouverture et de rencontres avec d’autres collègues. Ajustez si besoin.

• avec un effet démultiplicateur : l’initiative permet-elle de satisfaire plusieurs besoins à la fois ? Par exemple, l’aménagement d’une cuisine collective dans l’entreprise peut permettre d’agir à la fois sur la santé des collaborateurs et collaboratrices, la convivialité, l’équilibre vie pro-vie perso, la prévention des déchets, etc.

• bien intentionné : existe-t-il des zones d’ombre ou des jeux de pouvoir entre acteurs derrière l’initiative envisagée ? Ou la proposition fait-elle l’objet d’un consensus large ?

S’informer et se former sur la QVT

La Qualité de vie au travail est un sujet passionnant et exigeant, au croisement de différentes disciplines et courants : psychologie, sociologie, santé, management, développement personnel, etc. Comment se former sur le sujet ? Comment progresser en tant que professionnel.le ? Comment rester en veille sur les évolutions majeures ?

Voici quelques conseils et ressources utiles :

1. Lisez la presse spécialisée.

2. Gardez un esprit OUVERT ! Un ou une bonne professionnelle de la QVT doit être en mesure d’interroger le travail de manière systémique. Cela signifie saisir les enjeux dans leur complexité, depuis les risques physiques jusqu’aux risques psychosociaux, comprendre les mécanismes d’empowerment et d’intelligence collective, parler également performance et enjeux économiques. Discuter avec les différents acteurs de votre organisation et saisir leurs intérêts vous fera gagner du temps.

3. Impliquez-vous dans un collectif : de nombreuses communautés autour du bonheur ou du bien-être au travail ont émergé ces dernières années comme Les Passeurs du bonheur au travail issus de la Fabrique Spinoza, ou le Club des CHO (Chief Happiness Officers).